« Il manque cinquante dollars. » s’exclama la voix. Elle était allongée dans son lit, blottie dans le drap blanc tout en comptant les billets qu’on venait de lui donner. Tant dis qu’elle n’avait pas la prétention de sortir de son lit, d’enfiler une tenue convenable, l’homme, qui se trouvait à ses côtés quelques minutes encore auparavant, était entrain de s’habiller quant à lui. L’incompréhension se lisait sur son visage. « Mais… ce n’était pas ça le prix… » « Je suis navrée, mais la maison ne fait pas crédit ! » lança alors ironiquement la jolie blonde. Elle arbora son plus beau sourire –enfin l’un de ces plus beaux sourires. Il n’y avait pas à dire, en matière de communication et d’affaire, elle était une pro. C’était sûrement pour ces deux principales qualités qu’une fameuse agence de call girls l’avait recruté. Faire l’amour tout en gagnant de l’argent. Pardon, utilisons les termes de Jane : « Baiser pour du fric. ». Elle tendit sa main vers l’homme sans un mot, juste un regard pour lui faire comprendre qu’elle désirait son argent, et ça, tout de suite. Un soupir de la part de l’homme. Puis, vient qu’il chercha dans la poche de son pantalon qu’il n’avait pas encore mis son portefeuille. « Bien… voilà. » dit-il en donnant les quelques billets. Jane les attrapa puis compta à nouveau histoire de voir si le compte était juste. « Dix dollars. » « Pardon ? » « Il manque dix dollars ! ». A nouveau, un soupir de la part du client –puis ce que c’était qu’il était après tout : un client. Il rechercha alors à nouveau dans son portefeuille la somme qu’il lui manquait. Dix dollars, il ne manquait que cela pour avoir réglé alors entièrement la jeune femme. Il lui tendit alors deux pauvres billets accompagné d’un petit « voilà ! ». Un sourire se dessina sur ses lèvres, elle les attrapa et les mit avec les autres billets qu’elle avait dans la main. Satisfaite. Oh ça oui, elle l’était. Elle avait arrivé à faire payer un peu plus que la somme de départ à cet homme. Après tout, elle ne le connaissait pas, elle savait juste qu’il était cadre dans une entreprise ou quelque chose de la sorte. Son nom ? Elle l’ignorait totalement et sincèrement qu’est-ce qu’elle s’en foutait de ce détail-là. Oui sûrement elle l’a su à un moment donné, mais pour elle, ils resteraient que des inconnus. Que ses clients.
Jane attrapa le premier habit qui lui tomba sous la main. Elle ne prêta guère attention à ce qu’elle veut de prendre en main. Après tout, tant qu’elle pouvait le mettre, ce n’était qu’un détail après. Tout en s’habillant, elle guetta du coin de l’œil l’homme, son client. Ce dernier avait fini de se rhabiller et allait donc quitter l’appartement de Jane et rentrer chez-lui. Sans même qu’il prenne la parole, elle anticipa ses paroles et prononça un calme : « bonne fin de soirée ! ». Elle aurait pu ajouter son prénom, à son client, à la fin de sa phrase exclamative, il est vrai. Mais ce détail, elle ne l’avait pas retenu. Certains penseraient que c’est fort embêtant, mais elle, ça n’avait bel et bien pas l’air de la soucier.
La porte se referma et Jane se retrouva seule. Une certaine solitude qu’elle avait appris à vivre avec. Elle avait était seule toute sa vie à vrai dire. De sa naissance jusqu’à aujourd’hui. Jane n’était pas son vrai prénom, ni celui de January. Elle avait été nommée par ces femmes qui s’occupaient de l’orphelinat où elle avait été élevée toute son enfance et adolescence. C’était en janvier qu’elle avait été recueillie par ces religieuses d’où son prénom January. Oui, elle avait été élevée par des bonnes sœurs, ironie de l’histoire, elle est call girl. Elle ne s’était jamais imprégnée de ces normes et valeurs que dégageait la religion. C’était des conneries pour elle. Le pêché, c’est mal ; pas de rapport avant le mariage, etc. « Tu iras en enfer ! » lui répétait la mère supérieure. Ainsi son sort était celé. Elle le savait, elle était bonne pour l’enfer. Enfin voyez-vous, ça aussi ça lui importait peu… voire pas du tout même. Putain, mais qu’est-ce qu’elle s’en foutait de tous ces discours rabat joies qu’elle pouvait entendre. Elle se souciait de peu de chose à vrai dire. Chipant deux, trois vêtements qui trainaient par terre, elle les enfila par la suite. Un dernier coup d’œil sur le réveil qui indiquait l’heure, elle se leva de son lit et se dirigea vers la sortie. En attrapant au passage sa veste en cuir. Sa soirée allait se finir dans un des bars de la ville newyorkaise où elle allait retrouver quelques connaissances. Ce n’allait bien entendu par être l’un des bars huppés de la ville, mais bien là un des bars dans un des coins les plus malfamés. Après tout, ce n’était qu’une question de genre.